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La Cour de Justice de la CEDEAO et les droits de l’homme

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La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ou CEDEAO compte seize États. Il s’agit d’une organisation internationale qui a mis en place, en son sein, une Cour de Justice .

Cette Cour présente quatre caractéristiques qui, ensemble, la rendent véritablement unique :

  • la Cour peut être saisie par tout particulier (I) ;
  • avoir épuisé les voies de recours internes n’est pas une condition à remplir (II) ;
  • la Cour est compétente pour se prononcer sur les violations des droits de l’homme (III) ;
  • les décisions rendues par la Cour de Justice sont exécutoires (IV).

 

I. Une Cour de Justice ouverte à tous

 

Le fonctionnement de la Cour est essentiellement régi par plusieurs textes dont le protocole A/P1/7/91 relatif à la Cour de Justice de la Communauté tel qu’amendé en 2005.

Ce protocole amendé autorise aujourd’hui les particuliers à saisir la Cour pour se plaindre de faits commis par l’un des États membres de la CEDEAO : Bénin, Brukina Faso, Cap vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone et Togo.

 

II. L’épuisement des voies de recours internes n’est pas nécessaire

 

Pour saisir la Cour européenne des Droits de l’Homme, le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies ou tout autre juridiction internationale spécialisée dans les droits de l’homme, il faut épuiser les voies de recours internes.

Cela signifie que le particulier victime d’une violation des droits de l’homme doit d’abord chercher une réparation auprès d’un tribunal de première instance, d’appel (le cas échéant) puis auprès de la Cour suprême de l’État responsable.

Le protocole relation à la Cour de Justice de la Communauté a innové. Ce n’est plus une obligation.

Autrement dit, toute personne victime des droits de l’homme peut demander réparation immédiatement devant la Cour de Justice de la CEDEAO.

La disparition de cette règle est aujourd’hui très critiquée par certains États (ex. : le Bénin) et pourrait un jour prochain refaire surface.

 

III. La Cour est compétente en matière de droits de l’homme

 

La CEDEAO est, comme son nom l’indique, d’abord une communauté d’intérêts économiques.

Pourtant, les États parties ont décidé de donner à la Cour de Justice, une compétence en matière de droits de l’homme.

Les droits de l’homme applicables sont ceux que l’État membre s’est engagé, par traité ou bien à titre de coutume, à respecter et à faire respecter :

  • Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 (coutume),
  • Pacte international relatif aux Droits de l’Homme (traité),
  • Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (traité),
  • etc.

Une action devant la Cour peut être dirigée soit contre un État membre de la CEDEAO, soit contre un particulier dès lors que la violation des droits de l’homme alléguée s’est déroulée sur le territoire d’un État membre.

 

IV. Toute décision rendue par la Cour de Justice est exécutoire

 

Après avoir obtenu une décision condamnant un État, souvent, le plus difficile reste à faire à savoir : obtenir que la décision soit effectivement exécutée.

C’est l’une des difficultés auxquelles se heurtent ceux qui ont obtenu gain de cause auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme ou du Comité des Droits de l’Homme.

Chacun sait qu’il n’existe pas de police internationale qui obligerait un État à faire ce qu’il ne veut pas faire et le recours à la force armée n’est absolument pas, aujourd’hui, envisageable si c’est pour obtenir l’exécution d’une décision de justice.

Les rédacteurs du Traité de la CEDEAO ont réfléchi à la question et ont ainsi mis en place un palliatif : toute décision rendue par la Cour de Justice est, ipso facto, exécutoire (= ne nécessite aucune autre procédure juridique) sur le territoire de l’État membre considéré.

Cela signifie qu’il est possible d’aller directement devant ses tribunaux internes pour contraindre L’État concerné à s’exécuter.

Même si la corruption est importante, c’est une solution qui peut se révéler efficace.